Et l'Afrique y occupe une part souvent sous-estimée à différents titres. En premier lieu, c'est en Afrique qu'est pensé le statut « royal » des rois mages. Initialement, les rois mages sont interprétés comme des sages (en grec magoï); c'est le théologien Tertullien qui est à l'origine de la qualification de ces sages comme des rois. Tertullien est connu pour être un théologien latin (né vers 150-160 et décédé en 220); mais ce qui est plus souvent oublié c'est qu'il n'est pas Romain mais Berbère: il est le plus célèbre théologien de Carthage (actuelle Tunisie), bien avant le célèbre Augustin d'Hippone (354-430). C'est donc à un théologien carthaginois que l'on doit la qualification des sages en rois (mages). Et c'est Origène (né vers 185 et mort vers 253), théologien et Père de l'Église, qui a établi – sinon « stabilisé » – à 3 le nombre de rois mages. Il complète ainsi le premier chantier « d'identification » de Tertullien. Origène entretient lui aussi un lien avec l'Afrique: il est originaire d'Alexandrie (Égypte) où il découvre le christianisme, avant de se rendre en Grèce et en Palestine.
Melchior et Balthazar sont partis d'Afrique Sont partis d'Afrique, Melchior et Balthazar sont partis d'Afrique Avec le roi Gaspard...... Ils sont tous les trois partis � la belle �toile � la belle �toile Ils sont tous les trois partis � la belle �toile Qui les a conduits. Les bergers les ont suivis, jouant de la fl�te, Jouant de la fl�te, Les bergers les ont suivis, jouant de la fl�te Menant leur brebis Ils sont tous les trois venus, dedans une �table Dedans une �table, Ils sont tous les trois venus, dedans une �table Qu'ils ont reconnue.
Ce changement est le fruit d'une lente évolution. Car dès le Moyen Âge, où le culte des Rois mages devient populaire, Balthazar montre des traits et une chevelure qui le rattachent clairement à l'Afrique subsaharienne. En témoigne un exceptionnel bas-relief daté vers 1265–1268 de l'architecte et sculpteur Nicola Pisano pour la chaire du Duomo à Sienne, où Balthazar est accompagné de chameaux. Cette convention qui associe le mage à l'Afrique est perceptible dans quantité d'enluminures de la fin du Moyen Âge, quitte à l'associer à un page noir pour signifier son origine. À la fin du XV e siècle, Balthazar change d'allure. À l'époque où la traite négrière est en plein essor, et que des êtres transitent entre l'Afrique subsaharienne, l'Europe et les Amériques, le mage est de plus en plus souvent représenté dans les scènes d' Adoration avec la peau noire. D'abord en Flandres, puis en Italie. En Europe, la présence d'esclaves mis au service des puissants va fournir des modèles aux artistes. Pour ces derniers, peindre une carnation noire est un défi pictural.
L'Adoration des Mages par Diego Velázquez en 1619. Dans la religion chrétienne, les rois mages sont des personnages riches et puissants venus de Bethléem pour adorer Jésus peu après sa naissance. En bons astronomes, ils observent les étoiles et en repèrent une différente des autres. Ils l'interprètent comme un présage très important: la naissance du roi des juifs. Les rois mages suivent le déplacement de cette étoile particulière et sont menés à l'étable où Jésus vient de naître. En s'y rendant, ils apportent des cadeaux très symboliques. Qui sont les rois mages? Ces mages sont Balthazar, Gaspard et Melchior. Balthazar est décrit avec un visage noir, il est descendent de Cham, fils de Noé et représente l'Arabie. Il offre de l'or (réservé aux rois), symbole de la royauté de Jésus. Melchior est décrit comme étant jeune, au visage asiatique et représente l'Inde. Il offre de l'encens (employé pour honorer Dieu), symbole de la divinité de Jésus. Gaspard quant à lui, représente la Perse et est figuré comme un vieillard aux cheveux blancs.
voir toutes les images Pierre-Paul Rubens, L'Adoration des Mages, 1626–1627 i Huile sur toile • 2, 83 × 2, 19 m • Musée du Louvre, Paris • © Akg-images / Erich Lessing Dans les siècles suivants, le thème de l'Adoration des mages continue d'inspirer les plus grands artistes qui exaltent avec dramaturgie la visée universelle du message chrétien, tels Vélasquez ou Pierre Paul Rubens, auteur d'une dizaine de tableaux sur le sujet au cours de sa carrière. Au XVIII e siècle, Balthazar reste un modèle noir privilégié mais il n'est plus le seul à être représenté par les peintres. Les autres? Des domestiques. Leur peau noire sert de faire-valoir à la blancheur de leur maître ou maîtresse auprès desquels ils posent et que l'on cherche à mettre en exergue… Au contraire, Balthazar incarne un personnage noble, « noir, imposant, majestueux, royal », selon Daniel Arasse qui, lui, voit plutôt, chez Brueghel l'Ancien, Gaspar dans la peau du mage africain (cf. « On n'y voit rien », 2000): « Beau, traits fins, œil vif.